boucherie n. f.
◆ Action de tuer et de dépecer le porc (éventuellement d’autres animaux) et d’en faire de la charcuterie, des cochonnailles.
★ La boucherie a lieu normalement en automne, chez soi, à la ferme ; elle est suivie d’une période
de repas copieux, chez les particuliers mais aussi dans les restaurants de campagne,
où l’on peut déguster des spécialités gastronomiques de confection artisanale (abats,
boudin, saucisses, boutefas*, atriaux*, etc.). La boucherie peut aussi avoir lieu à d’autres époques de l’année, en particulier à la fin de l’hiver.
Le jour, le temps, l’époque de la boucherie. Porc, bétail de boucherie. Repas de boucherie. ⇒ bouchoyade, bouchoyage.
1 « Vers neuf heures on prenait le premier repas ; il faut tout de suite préciser que,
ce jour-là, c’était presque comme un jour de fête. Certains morceaux du porc, lors
de la boucherie, étaient mis en réserve pour le jour des labours. » J. Follonier, Valais d’autrefois, 1968, p. 17.
2 « Après les boucheries de fin d’automne, chacun apportait aux tanneurs de Sion la peau d’une vache, d’une
génisse, d’un veau ; on la ramenait six semaines plus tard en beaux rouleaux bruns,
luisants et souples. » M. Zermatten, Les Sèves d’enfance, 1968, p. 52.
3 « La boucherie a lieu tard dans l’automne, l’hiver, et aussi au premier printemps. / Dès les premiers
froids, fais du lard ! / Tue ton porc, n’attends pas trop tard ! » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1972 (1re éd. 1969), p. 107.
4 « Il [un aspic appelé gelée de ménage] est fait au moment de la boucherie et, par conséquent, seules des viandes de porc entrent dans sa composition. » J. Montandon, Le Jura à table, 1975, p. 25.
5 « Bien sûr, la boucherie à la ferme est encore une combine pour boire des verres, disait-on, samedi, à Denges,
chez G. G. ; mais, au moins, on a un cochon mort à se partager comme alibi. Et faut
bien noyer son chagrin ! » 24 heures, 14 janvier 1987.
◇ La viande elle-même.
6 « Nous sommes déçus par notre boucherie faite le 15 décembre. Je me permets de vous envoyer une de mes saucisses à analyser. » Le Sillon romand, 7 février 1975, p. 8.
◇ Le repas servi à l’occasion de la boucherie.
7 « Pour vos boucheries, VIANDE DE CHEVAL FRAÎCHE du pays. » Le Sillon romand, 17 décembre 1976, p. 19.
8 « BEAUX CHOUX pour la boucherie, à vendre. » Ibid.
◇ Faire boucherie loc. verb. Abattre un animal (en particulier un porc), le dépecer, préparer la salaison et la charcuterie pour les besoins domestiques.
⇒ bouchoyer.
9 « […] on est rentré à la ferme juste à l’heure du souper* ; tout le monde était à table et on mangeait du boudin, car on avait fait boucherie le jour avant. » W. Dubois, En poussant nos clédars, 1959, p. 175.
10 « Écoutez ! On fait boucherie. On a cherché la poix le matin. Le cochon, il a assez vécu ! On l’a tué et saigné,
on l’a viré [= retourné] sur une planche. » M. Chappaz, Portrait des Valaisans, 1965, p. 146.
11 « Nulle loi ne l’imposait mais quand les paysans faisaient boucherie, ils apportaient sa part au maître qui s’occupait de leurs enfants. » M. Zermatten, Les Sèves d’enfance, 1968, p. 136.
12 « On était à la fin de l’hiver, quand on recommence à faire boucherie et les gens manquent de bras pour tout l’ouvrage […]. » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1972 (1re éd. 1969), p. 48.
13 « À six ans je regardais un bouchoyage*, le paysan plantait la longue lame dans la gorge de la truie, le sang giclait et
bouillonnait, tout à coup le type se tourne vers moi : – Si tu es méchant on t’en
fera autant ! Voilà comment on fait boucherie dans les campagnes perdues. » J. Chessex, Carabas, 1971, p. 163.
14 « […] et voici un exemple d’un pâté de campagne parmi beaucoup de ceux qui se préparent
dans ce coin de pays, durant l’hiver, lorsqu’on fait boucherie. » J. Montandon, Le Jura à table, 1975, p. 88.
15 « Cinquante ans plus tôt, mon arrière-grand-père, instituteur, touchait à peu près autant
pour une année… Mais il est vrai qu’il avait le logement gratuit et qu’on ne l’oubliait
jamais quand le village “faisait boucherie” ou lors de la récolte des noix ! » Coopération, 29 janvier 1976.
16 « […] lorsque la vendange sera rentrée et que régnera dans la cave l’entêtante odeur
de la fermentation, le vigneron songera à acheter un cochon gras et à faire boucherie, quitte à pendre dans la cheminée de la ferme amie les jambons et les plaques de lard
pour les fumer. » J. Montandon, La Cuisine au fil du Rhône, 1977, p. 71.
17 « L’apparition de la congélation […] a transformé certaines habitudes des agriculteurs.
Avant son introduction, lorsqu’on faisait boucherie, il fallait écouler ou consommer rapidement le “frais” (boudin, foie, saucisse* à rôtir) à moins que le froid hivernal ne soit suffisant pour en assurer la conservation. » L’Express, 22 avril 1977, p. 21.
18 « Café-Restaurant du Raisin / Les Cullayes / On a fait boucherie / Tous les dimanches : fricassée [= ragoût contenant des morceaux d’échine, de jarret
et de cou du porc], saucisse* à rôtir, atriaux*. Réservez votre place s.v.p. » Tribune-Le Matin, 2 octobre 1977, p. 22.
19 « Pendant très longtemps, on n’a fait boucherie qu’une fois l’an ; ensuite, deux fois. On tuait un cochon en automne ; un autre vers
Carnaval… pas en prévision de la fête, non… c’était une période de l’année où la viande
pouvait bien sécher avant les chaleurs, sans que les vers s’y mettent. » M. Métrailler, La Poudre de sourire, 1980, p. 161.
Remarques. La boucherie désigne aussi, comme en français général, le lieu où l’on débite la viande et le
commerce où on la vend. — En France, on dit tuer le cochon (PR 1984).
Commentaire. Premières attestations : 1764 (il fait […] sa boucherie, v. Pier) ; 1829-32 (faire boucherie). Type très courant en Suisse romande, en français régional comme dans les dialectes ;
en France, n’a été relevé que dans l’Ouest (cf. faire la boucherie, régionalisme involontaire donné comme définissant de boucharder dans le Glossaire des parlers du Bas-Maine, G. Dottin, Paris 1899 ; faire boucherie est attesté en 1971, 1980 et 1981 dans le français régional de l’ouest de la France,
cf. RézeauOuest ; v. encore ALO q. 571 pour des attestations dialectales dans les départements
d’Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Vendée, Deux-Sèvres, Vienne, Charente-Maritime et
Charente). La locution est très bien attestée au Québec (Clapin 1894 ; Dionne 1909 ;
GPFC 1930 ; « rural » DQA 1992), ainsi qu’en Acadie (v. MassignonAcad I, 454, qui fournit avec un exemple
de 1747 la plus ancienne attestation), et jusqu’en Louisiane. Il se pourrait bien
que l’on ait affaire à un cas de conservation, en aires latérales, d’un archaïsme
du français général qui n’a jamais été reçu dans la lexicographie centrale.
Bibliographie. GuilleNeuch 1829-32 ; PeterCacol 1842 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch
1867 ; Pier ; FEW 1, 587b, *bucco- ; Ditchy Louisiane 1932 ; GPSR 2, 589a-592a ; ZumthorGingolph 1962, p. 259 ; Massignon
Acad 1962 ; IttCons 1970 (> DFV 1972) ; ALO q. 571 ; Alpha 1982 ; RézeauOuest 1984 ;
PR depuis 1984 ; GR 1985 ; NPR 1993 ; Lengert 1994 ; ThibQuébHelv 1996, p. 350.
Copyright © 2022, tous droits réservés
|