les citations
raclette n. f.
I.◆ 1.◆ Mets d’origine valaisanne, traditionnellement préparé en présentant à la flamme d’un feu de bois (ou, plus récemment, au rayonnement d’un gril électrique) un gros morceau de fromage du pays dont on racle la partie ramollie et rôtie (⇒ religieuse) au fur et à mesure qu’elle se met à fondre. Une raclette rôtie au feu d’arolle*. Déguster une raclette en plein air arrosée d’un bon vin blanc. ★ De nos jours, en particulier en milieu urbain, la raclette est le plus souvent préparée dans un four à raclette (v. ci-dessous I 3) autour duquel se réunissent les convives. On l’accompagne normalement de pommes de terre en robe des champs (⇒ rondes), de légumes macérés dans le vinaigre, de charcuterie, etc., le tout arrosé d’un vin blanc du pays. Faire une raclette. Inviter ses amis pour une raclette. Manger la raclette en famille. Boire du fendant* avec la raclette. Se faire une raclette avec du bagnes*. Souper*, soirée raclette, souper, soirée où l’on sert ce mets.
1 « Après les brefs remerciements de M. E. S., président de la société de chant, ce fut le départ pour la splendide forêt de mélèzes sise à 500 mètres du village où une succulente raclette arrosée des meilleurs crus de nos coteaux calmèrent les appétits les plus voraces ; de nouvelles productions de la chorale portèrent la joie des participants à son maximum. » Nouvelliste et Feuille d’Avis du Valais, 1er août 1969, p. 10.
2 « Que peut-on, je vous le demande, trouver de plus gastronomique, de plus parfait, de plus délicieux, de plus idéal comme repas qu’une raclette prise au milieu d’un de ces hauts pâturages, face aux Alpes ? Le feu de bois qui crépite, la bouteille de fendant* posée au frais dans le ruisseau glacé, le soleil et le petit vent de l’alpe*, et pour seul fond sonore les sonnailles des troupeaux et les cris aigus des corneilles, que pourrait rêver de mieux le vrai gourmet, amoureux des mets simples et authentiques ! » J. Montandon, Le Valais à table, 1975, p. 26.
3 « La véritable raclette se fait en posant une demi-pièce de fromage sur une pierre plate devant les braises d’un feu de bois, en plein air ou dans une cheminée. On peut aussi utiliser un four électrique [v. ci-dessous I 3] dont il existe des modèles très perfectionnés, notamment ceux où la pièce est placée à l’horizontale, ce qui empêche le fromage fondu de couler, et qui permettent de racler la tranche sur toute sa longueur. Les “raclettes” où l’on fait fondre des tranches de fromage, au four ou dans une poêle en Téflon placée sur un réchaud, sont à notre avis dénaturées. » M. Vidoudez, J. Grangier, À la mode de chez nous, 1976, p. 49.
4 « Il est exact que le prestige dont jouit la raclette dans tout le pays est considérable, surtout en période estivale. Quelle clairière, quelle orée de forêt qui ne se prête à des rencontres amicales et à des épousailles merveilleuses entre le fromage et le fendant*. » Coopération, 19 août 1976.
5 « La raclette s’est maintenant civilisée, urbanisée. Les fromages ne connaissent plus guère que l’infrarouge des fours électriques, et ils ont souvent acquis un petit accent italien ou savoyard qui peut faire douter de l’authenticité de leur origine. » J. Montandon, La Cuisine au fil du Rhône, 1977, p. 21.
6 « La kermesse débutera vendredi à 18 h. et se prolongera jusqu’à 1 h. du matin, chaque jour. Un restaurant campagnard offrira des spécialités grecques, du jambon à l’os, la raclette et divers plats de chez nous. » Tribune-Le Matin, 1er juin 1977, p. 5.
7 « Lorsqu’on se trouvait dans un endroit où il y avait du bois, on faisait un bon feu, on rôtissait le fromage. C’est l’origine de la raclette. Quand j’étais jeune, personne n’aurait osé offrir une raclette à quelqu’un ; c’était un plat commun, un repas de berger. Aujourd’hui, comme les choses changent, c’est devenu un repas raffiné. […] La raclette que j’ai connue n’était pas la même que celle que l’on fait maintenant en râclant [sic] le fromage fondu à la chaleur d’un feu ou d’un appareil électrique. Elle consistait à piquer un morceau de fromage sur un bois fourchu, à trois branches, à le faire griller devant les braises. » M. Métrailler, La Poudre de sourire, 1980, p. 157.
Une raclette, une portion individuelle de raclette. Servir, offrir des raclettes à la clientèle, des portions individuelles de raclette. Stand, bar à raclettes, comptoir où l’on sert des portions de raclette, dans une foire ou une manifestation quelconque.
8 « Samedi soir, un bal rassemblait une foule de jeunes et moins jeunes jusqu’à potron-minet, dans l’ambiance et la gaîté. Au bar des Sapins verts, l’on se contait fleurette. Et, au stand à raclettes, on reprenait des forces en dégustant de succulentes portions de fromage fondu accompagnées du verre de l’Amitié 77. » La Gruyère, 10 septembre 1977, p. 5.
(Fig.) Savoir s’arrêter avant la dernière raclette, avant qu’il ne soit trop tard.
9 « “C’est peut-être aussi une des caractéristiques de ce comptoir* de coïncider avec le départ de mon “encombrante” personne qui a, durant sa vie au moins, appris à manger la raclette : c’est-à-dire à s’arrêter avant la dernière”, a conclu avec humour le président* de Martigny vivement applaudi. » Tribune-Le Matin, 3 octobre 1976, p. 21.
10 « Cependant la phrase historique de ces élections c’est bien entendu E. M. qui l’a prononcée. “En politique c’est comme au festival, faut savoir s’arrêter avant la dernière raclette” […]. » La Terreur (journal de Carnaval, Valais), édition jaune, 1977, p. 3.
Fromage à raclette (v. ci-dessous I 2). Une meule de fromage à raclette. Couper le fromage à raclette en morceaux, en tranches.
11 « Après deux mois de stockage, les fromages à raclette seront prêts à être mis à la consommation. Les pièces pèsent de 6 à 7 kilos et ont une épaisseur de 6 à 7 centimètres. La marque officielle de provenance du fromage a été incrustée en creux par le moule à éclisse sur le pourtour de la pièce. » J. Montandon, Le Valais à table, 1975, p. 19.
12 « Les qualités d’un bon fromage à raclette sont les suivantes : crémeux (mais pas trop gras), beaucoup de goût (sans être trop salé). Le bon âge d’un fromage suisse se situe entre trois et cinq mois. » M. Vidoudez, J. Grangier, À la mode de chez nous, 1976, p. 49.
13 « Imbibez légèrement d’huile les tranches de pain rassis ou de pain anglais. Enduisez-les de purée de tomates et posez par-dessus une belle tranche de fromage à raclette […]. » Bouquet, 4 août 1976, p. 80.
14 « Hélas ! souvent, l’authentique fromage à raclette fait défaut et est remplacé par un produit de moindre qualité. » Coopération, 19 août 1976.
15 « Du rapport d’activité, on a spécialement retenu le fait que la production de fromage à raclette du pays a augmenté, ce qui fait plaisir aux nombreux amateurs de ce produit. » Le Sillon romand, 17 décembre 1976, p. 9.
↪ V. encore s.v. bagnes ; vacherin 2.
Pommes de terre à raclette, petites pommes de terre de forme arrondie, particulièrement appropriées pour accompagner ce mets.
16 « Et pour terminer, un conseil aux consommateurs avertis : achetez plus souvent des pommes de terre à rôtir ou à raclette (calibre 30-35 millimètres). Elles sont excellentes et avantageuses : leur prix est en effet 10 à 15 centimes meilleur marché le kilo que les pommes de terre habituelles. » Coopération, 16 septembre 1976.
Remarques. Cf. encore les dér. racleur n. m. “personne qui racle le fromage à raclette fondu” (« un bon racleur arrive à l’épuisement pratique des talons [de la meule] » J. Montandon, Le Valais à table, 1975, p. 35 ; v. encore s.v. religieuse 1) et raclage n. m. “action de racler le fromage à raclette fondu” (« la spectaculaire mais difficile jonglerie des champions du raclage sauvage » ibid.).
I. 2.◆ (par métonymie) Fromage gras valaisan, au lait de vache et à pâte pressée et cuite, utilisé pour la confection de la raclette. Du / de la raclette. Une meule de raclette. Une demi-lune de raclette. Raclette suisse en tranches. Des tranches de raclette.
17 « Une magnifique variation dans le plan des menus et une joie pour toute la famille. Simplement réchauffer les tranches de raclette, les disposer dans l’assiette (et épicer selon goût). Servir avec des pommes de terre en robe des champs, des cornichons et des petits oignons. C’est tout. » Coopération, 10 novembre 1977.
I. 3.◆ four à raclette n. m. Appareil, utilisé en particulier dans la restauration, comportant un support à hauteur réglable pour la demi-meule de fromage et un élément à rayonnement infrarouge auquel la tranche se trouve exposée à l’horizontale, empêchant ainsi le fromage fondu de couler.
18 « [publicité pour un restaurant] Spécialités du pays et miel frais et contrôlé garanti pur de fleurs de montagne. Exposition de pyrogravure. Terrasse couverte, 250 places, 6 fours à raclette, broche et grillade. » Nouvelliste et Feuille d’Avis du Valais, 6 août 1976, p. 17.
19 « Sur demande préalable, four à raclette gratuit, en prêt, à partir d’une demi-pièce [de fromage]. » 24 heures, 8 septembre 1977, p. 34.
20 « Pour votre table : […] Four à raclette […] pour 2 demi-pièces de fromage, supports basculants. » Le Pays, 20 janvier 1977, p. 7.
21 « Four à raclette […] boîtier en métal noir, base en fonte avec carrelage céramique, corps de chauffe infrarouge, bras pivotant en fonte laqué avec 2 porte-fromages basculables, hauteur réglable […]. » Haushaltapparate / Articles ménagers / Articoli elettrodomestici ‘95, catalogue de la maison Electroline, p. 63.
↪ V. encore s.v. carnotzet.
◇ Petit réchaud pour l’usage domestique composé d’un élément chauffant, d’une plaque inférieure sur laquelle on dépose de petits poêlons (souvent recouverts de téflon) servant à exposer à la chaleur les tranches de fromage, et d’une plaque supérieure, en métal ou en pierre, sur laquelle on peut faire griller des légumes ou de la viande.
22 « Four à raclette / partie supérieure en tôle d’acier émaillée, réflecteur chromé, partie inférieure en isolant, corps de chauffe métallique, plateau en acier au chrome, 1,75 m de câble […] ; 6 poêlons émaillés / Ø 30 cm » Haushaltapparate / Articles ménagers / Articoli elettrodomestici ‘95, catalogue de la maison Electroline, p. 61.
II.◆ à la raclette loc. adv. De justesse. Il a passé l’examen à la raclette. Être élu à la raclette.
23 « Je n’en mourrais certainement pas, mais je serais extrêmement mortifiée si mes chers amis des Charmilles obtenaient le titre “à la raclette”, parce que leurs principaux adversaires se seraient mélangé les tibias dans leurs derniers matches. » Tribune de Genève, 18 juin 1977, p. 17.
24 « Finalement, après avoir hésité, le Tribunal correctionnel de Vevey [VD] a accordé le sursis à Jean. À la raclette ! » L’Est Vaudois, 29 avril 1992.
25 « Promu à la raclette, le grand dadais survivra-t-il à une année encore plus sélective ? » La Liberté, 1er septembre 1992.
26 « Toute cérémonie de remise de diplômes met en lumière les mérites de quelques élèves particulièrement doués. Et ceux qui passent à la raclette ont quand même le droit d’empocher leur titre et de fêter. » La Liberté, 9-10 juillet 1994, p. 11.
27 « [titre] H. K. réélu “à la raclette”. » La Presse, 16 novembre 1994, p. 33.
Commentaire. I. Première attestation : 1875 (« Il faut dire que c’était le temps de la raclette, saison propice aux gais rendez-vous. Si vous m’en croyez, gourmets délicats, vous irez à Sion au temps de la raclette. Les fromages sont descendus de la montagne […]. » Nouvelle Gazette du Valais, 16 juin 1875, p. 2 ; attestation repérée par D. Allet-Zwyssig dans Annales valaisannes 65 (1990), p. 91. Innovation suisse romande. Il doit plutôt s’agir d’un dér. en ‑ette sur racler que d’une spécialisation sémantique de frm. raclette n. f. “petite racle”. La fortune du mot (et du référent qu’il désigne) est considérable ; en Suisse, les trois autres groupes linguistiques l’ont emprunté (v. DudenSchweiz, Petralli, PledariGrond) ; à l’étranger, les fours à raclette pour usage domestique sont diffusés dans le commerce et l’on connaît désormais le rituel de la raclette (à tout le moins sous sa forme moderne, jugée par certains comme dénaturée) en France, en Allemagne et même au Canada. Aussi, la marque « régional (Suisse) » dans GR 1985 et 2001 n’a plus guère de raison d’être de nos jours, et on lui préférera la formulation du TLF, qui note simplement « d’origine valaisanne ». Il est vrai, toutefois, que le mode de préparation traditionnel est inconnu à l’extérieur de la Suisse, et que le mot jouit dans ce pays d’une fréquence relativement élevée et y connaît un éventail de connotations beaucoup plus riche. — Certains dictionnaires définissent la raclette comme une “fondue au fromage […]” (Lar 1963 ; GLLF 1977 ; TLF). Cette formulation est très maladroite et irrecevable pour le sentiment linguistique des Suisses romands, le terme de fondue faisant référence à un tout autre mets. — FEW 10, 81a, *rasclare 1 a ; MüllerMarécottes 1961, p. 43, 84 ; MeijerEnq 1962, p. 52, 74, 78, 133 ; SchüleListeLar 1978 ; Lar 1982 ; DudenSchweiz 1989 ; Petralli 1990 ; TLF ; PledariGrond 1993 ; Lengert 1994. — II. Première attestation : 1820 (GaudyGen). Innovation romande ; dans cette locution métaphorique, raclette évoque (ou évoquait à l’origine) une planchette servant à racler le dessus d’une mesure de blé pour la rendre rase, au lieu d’être comble.
Bibliographie. GaudyGen 1820, 1827 ; HumbGen 1852 ; IttCons 1970 (> DFV 1972) ; ArèsParler 1994 ; KublerExpr 1995, p. 282.
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