crocher v.
1.◆ (v. tr.) Accrocher ; suspendre ; fixer solidement. Crocher une remorque. ⇒ appondre I 1.
1 « J’ai croché un tableau au mur. » Enq. CD/I, mars 1976 (NE Bôle).
2 « J’ai croché la balançoire à une branche. » Enq. CD/I, juillet 1976 (BE Saint-Imier).
3 « Croche ton manteau à ce clou. » Enq. CD/I, juillet 1976 (BE Moutier).
4 « Puis comme c’est entaillé au bout, y a juste la place pour crocher votre pardessus. » RSR I, 18 décembre 1976.
◇ croché, ‑ée part. passé-adj. Accroché ; suspendu. Rester croché.
5 « Allez me graisser les anneaux du déluge qui sont crochés à la corne des ravines en haut des villages. » M. Chappaz, Le Match Valais-Judée, 1968, p. 179.
6 « Par bonheur qu’elle [une truite] était solidement crochée. Il la délivre du hameçon qui laisse à son museau une trace sanglante. » D. Baud-Bovy, L’Homme à la femme de bois, 1970, p. 37.
7 « Une finale émotionnante car Lion et Cathy sont restées crochées par le collier pendant trois bonnes minutes [il s’agit d’un combat de reines*]. » Nouvelliste et Feuille d’Avis du Valais, 10 octobre 1977, p. 16.
◇ (emploi fig.)
8 « Même Katarina Witt, la reine revenante […], parut plus brillante que la “prima donna” du jour. Pourtant, elle resta crochée à la 6e place [du classement]. » Le Nouveau Quotidien, 25 février 1994, p. 29.
◇ se crocher v. pron. S’accrocher, rester accroché. Ces deux vaches se sont crochées (lors d’un combat de reines*), elles sont restées accrochées l’une à l’autre, leurs colliers se sont accrochés
l’un dans l’autre.
2.◆ (v. intr.) Crocher (à), apprécier, démontrer de l’enthousiasme, être très pris par (un spectacle, une manifestation,
etc.).
9 « Le public, bien que décontenancé, a semble-t-il “croché” et ne ménagea pas ses applaudissements au terme du spectacle. » Le Pays, 3 décembre 1976, p. 3.
10 « Un fameux quatuor pour une bien belle fête, le choix des hommes et de la thématique
s’est révélé judicieux, à preuve, le public a “croché” massivement à l’événement. » Coopération, 11 août 1977, p. 1.
11 « Mais, comme la langue bretonne, le gallo se bat pour sa survie depuis plusieurs années.
Ceux qui mènent ce combat pour cette survie sont du reste récompensés : les jeunes
crochent partout pour l’école en deux langues (français, breton) ou pour la connaissance,
en deuxième ou troisième langue, du breton ou du gallo. » L’Express, 18 janvier 1995, p. 28.
12 « Je n’ai jamais pu crocher avec le skate. Par contre, le snake [= planche à roulettes articulée], j’ai tout
de suite adopté. C’est plus maniable, on est tout de suite dans le coup […]. » Le Nouveau Quotidien, 19 juillet 1996, p. 15.
3.◆ (v. tr.) Attacher, agrafer, fermer (un vêtement, des boutons ou des agrafes). Crocher les boutons de sa chemise, crocher son manteau.
13 « Crochez votre col ! […] Ben, y fait chaud, mon capitaine… » M. Zermatten, Pays sans chemin, 1966, p. 219.
14 « […] le docteur enfile sa blouse croche les boutons boutonne ses guêtres […] » A.-L. Grobéty, Zéro positif, 1975, p. 287.
15 « Croche ton manteau, il fait froid. » Enq. CD/II, 1975-1981 (JU Porrentruy).
16 « Donc je ne la regardais même pas dans son lit quand elle n’avait pas croché son pyjama, chaque fois je lui ai dit de remonter le drap et que je l’embrasserais
après. » J. Chessex, Le Séjour des morts, 1977, p. 168.
17 « Elles rajustent les bonnets bien sur les oreilles, elles crochent les vestes pour qu’ils n’aient pas froid, elles enlèvent les petites jaquettes* pour qu’ils n’aient pas trop chaud […]. » A.-L. Grobéty, La Fiancée d’hiver, 1984, p. 428.
◇ (v. pron.) Une robe qui se croche par derrière.
4.◆ (v. intr. ou tr. ind.) Travailler d’arrache-pied ; être tenace, persévérer, ne pas lâcher, tenir bon. Crocher à son travail. ⇒ crocheur ; régater.
18 « L’Italien essaie bravement de s’y faire, il a le cafard mais il croche ; […]. » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 34.
19 « Faut que je croche si je veux arriver. » Enq. CD/I, février 1976 (VD Arnex).
20 « C’est le moment de crocher ; l’heure de tes examens approche ! Regarde Jacques, c’est un crocheur* lui. » Enq. CD/I, juillet 1976 (BE Moutier).
21 « Ce sont des conductrices qui “crochent” à leur travail. Contrairement à certains chauffeurs qui “plaquent” parfois leur voiture pour aller taper le carton dans un café, elles sont à leur volant
du début à la fin de leur service. » Le Nouvel Illustré, 3 novembre 1976, p. 21.
22 « Il y a ceux qui ne cherchent pas tellement le travail ou qui ne sont jamais contents.
[…] Je leur préfère ceux qui conduisent leur vie plus intelligemment, qui étudient,
qui “crochent”, travaillent la nuit s’il le faut. » Femina, 1er septembre 1977, p. 13.
23 « Casquette sur les yeux et pull noir, il exhorte une douzaine de comédiens : “On tient le bon bout, mes enfants, mais faut crocher hein ! Faut rester sur les bons rails. En place s’il vous plaît !” » La Suisse, 7 avril 1982, p. 40.
24 « J’aime la compétition. J’aime les défis. L’adversaire va plus vite ? Pourquoi pas
moi ? Je veux aussi arriver et je croche. » La Liberté, 10/11 mars 1990.
25 « – Comment s’est déroulé [sic] la remise en forme, sur le plan physique ? / – J’ai croché comme un malade. Quitte à demander des entraînements privés en plus, pour bien démontrer
mon nouvel état d’esprit. » Tribune de Genève, 9 mai 1995, p. 15.
5.◆ (v. tr.) Heurter au passage.
27 « J’ai croché le manche de la casserole et je me suis brûlé la jambe. » Témoin âgé d’env. 55 ans, 11 janvier 1977 (Neuchâteloise d’origine valaisanne).
6.◆ (v. intr.) Trébucher, s’accrocher.
28 « Mais nous en sommes encore au début, nos phrases sont hésitantes, les mots crochent, il y a des sons que nous n’arrivons pas à prononcer. » Femina, 1er juin 1977, p. 58.
Remarques. Avec le sens de “suspendre” (v. ci-dessus 1), le verbe est considéré comme vieux en français de référence (v. TLF
pour un exemple de Flaubert). — L’emploi classé ci-dessus 6 (“trébucher, s’accrocher”, emploi fig. en parlant de mots) est illustré dans TLF (6, 516b s.v. crocher A 2, troisième rem.) par une citation (n° 3) de Ramuz ; il y manque une marque « rég. (Suisse) ».
Commentaire. Première attestation en Suisse romande : 1699 (v. Pier). Il s’agit probablement de
la continuation locale d’afr. mfr. croch(i)er “accrocher” (v. FEW ; GPSR), ou d’une transposition en français régional du mot patois correspondant.
Des avatars de ce type subsistent en français moderne, le plus souvent comme termes
techniques (marine, musique, etc. ; v. TLF et GR). En Suisse romande, le terme est
d’un emploi courant et prend généralement en charge la plupart des sens de accrocher. Cf. encore Savoie crocher v. tr. “agrafer (par ex. une robe)”. V. aussi DRF.
Bibliographie. GaudyGen 1820, 1827 ; GuillNeuch 1829-32 ; PeterCacol 1842 ; HumbGen 1852 ; CalletVaud
1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch 1867 ; ConstDésSav 1902 ; Pier, PierSuppl ; FEW 16, 401b-402a, *krôk 2 a ; GPSR 4, 572a-574a ; IttCons 1970 ; Had 1983 ; PR depuis 1984 ; GR 1985 ; RézeauBibl 1986 ; PLi depuis 1989 ; NPR 1993 ; Lengert 1994 ; DRF 2001 ; GR 2001.
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