les citations
raccard n. m. (exceptionnellement racard)
◆ Construction alpine traditionnelle de dimensions relativement modestes servant à emmagasiner les céréales, ainsi qu’à faire sécher herbages, jambons, saucissons et autres viandes. ★ Les raccards, représentants typiques de l’architecture montagnarde valaisanne, sont en général faits de planches de mélèze qui acquièrent avec l’âge une belle couleur foncée. Normalement coiffés d’un toit en tuiles d’ardoise, ils reposent sur des piliers surmontés d’une grande plaque de pierre circulaire qui empêche les rongeurs d’y avoir accès. Ils sont en outre munis de nombreuses ouvertures d’aération. De nos jours, on les achète pour les rénover et même parfois pour les démonter et les transporter sur un autre site. Les poutres et les planches ainsi démontées peuvent aussi être employées comme éléments décoratifs dans les restaurants, les carnotzets*, etc. Les raccards valaisans. Un vieux raccard en madriers de mélèze. Les piliers, les pilotis d’un raccard. À vendre : raccard à transformer, à démonter. Des jambons suspendus aux poutres d’un raccard. ⇒ cabane ; chalet 1 ; mayen 2 ; mazot.
1 « Cette vallée offre l’occasion de s’initier à l’économie alpestre sous la forme la plus simple, à laquelle répond une architecture paysanne, très sobre, commune à tous ces pays des Dranses. En règle générale, l’architecture en pierre prédomine dans les villages. Les raccards, eux, sont en bois, montés sur pilotis courts, et garnis sur leurs faces de galeries et de séries de longues perches pour mettre à sécher les herbages. » Nouvelliste et Feuille d’Avis du Valais, 8 juillet 1965.
2 « J’ai vécu mon enfance dans la crainte du feu, dans la peur de la mort. […] Village de bois, sur la colline, vieilles poutres desséchées par le soleil, proies craquantes, mèches de paille entre les madriers des “raccards”, désordre de toutes ces bûches éparses ou entassées : provocations… » M. Zermatten, Les Sèves d’enfance, 1968, p. 65.
3 « Pourquoi ces bâtisses aux poutres mal jointoyées, à la porte basse ? Pourquoi ces toutes petites ouvertures grillagées de treillis à la place des fenêtres ? Et pourquoi, mais pourquoi donc avoir coupé les pieds de cette construction sur pilotis pour intercaler de grandes dalles de granit, plates et vaguement arrondies ? C’est que le raccard n’est pas une habitation, mais un garde-manger […]. C’est qu’on n’a pas besoin de beaucoup de lumière […] mais de beaucoup d’air pour sécher ce qu’on veut y conserver. C’est qu’il faut du treillis bien fin pour se protéger des mouches, et que les plaques de granit sont le meilleur barrage qu’on ait jamais trouvé pour éviter que les souris ne viennent se régaler de ce que les hommes ont prévu pour assouvir leur faim et satisfaire leur gourmandise. » J. Montandon, Le Valais à table, 1975, p. 28.
4 « Dans ce contexte, signalons aussi le hameau de Vichères [VS] entièrement rénové dans son cadre ancestral. Français et Belges ont une certaine prédilection pour ce lieu de villégiature. Ils aiment séjourner dans ces vieux raccards, transformés en magnifiques chalets*. » V. Darbellay et al., Liddes, 1976, p. 16.
5 « Prenons l’exemple du raccard [en italique dans le texte] où l’on entreposait le blé. Si les héritiers étaient au nombre de quatre, chacun en avait le quart ; ce coin ou ce demi-coin, on l’appelle lo quetso [id.] en patois. De partage en partage, il rétrécissait encore. Il devenait sujet à querelles quand il fallait effectuer des réparations, mettre tous les propriétaires d’accord ! Il y avait des discussions sans fin ; parfois on abandonnait le raccard [id.] à la ruine. C’est pour ça qu’on en voit beaucoup dans la campagne, inutilisés, délabrés. Plus personne ne veut les utiliser. » M. Métrailler, La Poudre de sourire, 1980, p. 147-148.
6 « Le raccard, c’était le grenier de nos ancêtres qui y entreposaient le blé, mais aussi la viande sèche, le lard et autres saucisses. Montés sur quatre piliers coniques, ils étaient posés sur des meules d’appuis [sic] de granit qui faisaient obstacle aux souris et autres rongeurs. » La Suisse, 10 avril 1982, p. 21.
7 « L’organisation de protection du paysage ne s’oppose pas à tout assainissement. Mais, selon elle, seuls les bâtiments déjà affectés à l’habitat – à l’exclusion des raccards, greniers ou écuries* – devraient pouvoir devenir des maisons de vacances. » Le Nouveau Quotidien, 18 janvier 1994, p. 8.
↪ V. encore s.v. chalet 2 ; génisson ; johannis(berg) ; mayen 1 ; mazot 2 ; tavillon.
Localisation. Canton du Valais ; Alpes vaudoises. Le mot bénéficie en outre d’une connaissance à tout le moins passive dans toute la Suisse romande.
Commentaire. Premières attestations : 1224, Sion (dans un nom propre : Anselmi dol Racart) ; 1228, comme appellatif, dans un texte en latin (frustum campi apud lo rascart) ; v. J. Gremaud, Documents relatifs à l’histoire du Valais, t. I, p. 255 et 275 ; v. encore HuberHisten 1944, p. 95 n. 1 pour des matériaux anciens inédits tirés du fichier du GPSR. À l’époque moderne : 1812 (« on rencontre un petit village, où il y a beaucoup de raccards pour y déposer les grains et la paille » H. Schiner, Description du Département du Simplon, p. 321). Dialectalisme d’origine préromane, également attesté en Savoie et dans le Val d’Aoste ; v. HuberHisten 1944, p. 94 n. 1 et FEW pour le détail des formes patoises. K. Huber (suivi par J. Hubschmid dans FEW) propose un prototype *rascoardum*ras(i)kuáretu pour rendre compte de l’ensemble des formes attestées. Contrairement à ce que suggère LittréSuppl (suivi par ConstDésSav et même TLF), le mot n’est pas apparenté à fr. rancart ; TLF a toutefois raison de le rapprocher de l’hapax frm. regard n. m. “raccard” (1779, H. B. de Saussure ; v. FEW), qui appartient à la même famille.
Bibliographie. « rakard » Bridel 1866 (att. patoise) ; LittréSuppl 1877 (att. valaisanne de 1873) ; « râcâr » ConstDésSav 1902 (att. patoise) ; JaccardTopon 1906 ; Pier s.v. loge ; MüllerMarécottes 1961, p. 141 ; SchüleNendaz 1963 ; SchüleListeLar 1978 ; « en Suisse » Lar 1979 ; « en Suisse » PLi depuis 1980 ; « racard, rascard » MartinAost 1984 ; « Suisse » PR depuis 1984 ; « régional (Valais) ; var. (Aoste) rascart » GR 1985. 2001 ; « région. (Savoie et Suisse) » TLF ; FEW 22, I, 221b-222a ; « Suisse » NPR 1993 ; Lengert 1994 ; OffScrabble 1995.
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