les citations
verne n. f. (exceptionnellement vergne n. m., f.)
1.◆ Aulne, arbre feuillu poussant dans les terrains marécageux ou humides. Des branches, des feuilles de verne. De hautes haies de vernes. Des bosquets, des taillis, des îlots de vernes. Des vernes poussant au bord de l’eau. Un petit ruisseau qui coule entre les vernes. ⇒ arolle ; foyard.
1 « Je suis partie aux étangs qui sont à une heure d’ici, à travers les prés et les vernes où rôde en silence un large ruisseau gris, lourd de limon. » C. Bille, La Fraise noire, 1968, p. 116.
2 « Cet îlot occupe à peu près le centre d’une étroite prairie qui forme un des paliers de la vallée. De trois côtés des bois le dominent : sapins, hêtres, quelques érables qui s’accrochent à la montagne ; sur le rebord du quatrième, il n’y a qu’une haie de vernes dont le feuillage semble peint en bleu, et qui laisse passer un grondement monotone, tantôt éloigné, tantôt rapproché, selon le vent. » D. Baud-Bovy, L’Homme à la femme de bois, 1970, p. 7.
3 « Une vallée c’est un torrent avec au bout des doigts le papillotement constant de la lumière sur les feuilles, plus petites que des timbres, des aulnes, des vernes. » M. Chappaz, J.-M. Lovay, La Tentation de l’Orient, 1970, p. 71.
4 « Nous sommes au centre des dévaloirs*. Soudain surgissent des petits mélèzes comme des fusils, mélèzes secs aux troncs fendus, aux branches tuées par le vent, parmi les vernes déjà nerveuses, juteuses. » M. Chappaz, La haute route, 1974, p. 90.
5 « À tout moment y en avait un qui partait chercher le flacon derrière une de ces vernes et c’était la ritournelle : tous les autres faisaient cercle pour lui donner un coup de main !… » G. Clavien, Châtaignerouge, 1977, p. 253.
6 « Comme cela se passe toujours en pareil cas, ces derniers [des braconniers] avaient largement eu le temps de cacher leurs fusils. Assis en rond dans les “vernes”, ils attendaient de pied ferme celui qui était officiellement chargé de les surprendre. » Gazette de Lausanne, 26-27 novembre 1983.
7 « On allait ramasser le bois mort dans la forêt. À 8 ou 9 ans, au bord de la Sarine, on coupait des vernes. On les ramenait à la maison et on alignait les morceaux. » La Liberté, 23 décembre 1992.
8 « Deux érables des communes d’Albeuve et Villars-sous-Mont, un hêtre d’Attalens et une verne noire de la Montagne-de-Lussy ont été tranchés en plaques de 0,7 mm d’épaisseur afin de servir à des placages. » La Liberté, 15 octobre 1993, p. 19.
↪ V. encore s.v. pive 1.
(exceptionnellement, au masc.)
9 « Ils traversèrent les buissons de noisetiers et les vernes déjà blancs, grimpèrent une pente givrée, suivirent une sente sous les sapins dont ils ne voyaient plus les faîtes et atteignirent enfin l’étroit plateau dénudé. » C. Bille, La Demoiselle sauvage, 1974, p. 45.
Remarques. Cet exemple, cité dans Lengert 1994, est discutable. En toute rigueur, l’adj. blancs pourrait se rapporter à les buissons de noisetiers et les vernes (et non seulement à vernes) ; il ne s’agirait pas alors d’un ex. de verne au masculin.
(exceptionnellement) vergne n. m., f.
10 « Saint Bernard s’appuie sur une canne. Le Diable porte la musette. Ils se tirent encore par un bras aux mottes, aux rhododendrons, aux vergnes naines. » M. Chappaz, Le Match Valais-Judée, 1968, p. 193.
11 « […] ce n’est que ce matin qu’il a pu regarder le corps de l’oiseau déjà entamé, il avait dû rester coincé dans un vergne, maintenant il bâillait comme une bouche et les asticots le pourléchaient jusqu’au foie. » J. Chessex, Où vont mourir les oiseaux, 1980, p. 14.
2.◆ (par métonymie) Bois de cet arbre.
12 « Il […] offrait à son élève, enfin, à défaut de règles latines, des images taillées dans la verne, le noisetier, le bouleau. » M. Zermatten, Pays sans chemin, 1966, p. 77.
Remarques. L’équivalent du fr. de référence, au(l)ne, se rencontre aussi en SR, en particulier dans la langue littéraire, où il semble avoir le rôle de variante stylistique (v. ci-dessus l’exemple de Chappaz et Lovay, où les deux termes se côtoient).
Commentaire. Première attestation en SR : 1560 (v. Pier). Type lexical d’origine gauloise attesté dans toute la moitié sud du domaine galloroman, où il règne sans partage sur une aire qui remonte jusqu’à la Loire à l’ouest et atteint le sud des Vosges à l’est ; dans le nord, c’est le type aulne qui domine (v. ALF 74 et FEW). Cette frontière observée dans les patois s’est perpétuée dans les français régionaux (v. bibliographie différentielle ci-dessous et DRF) et se trouve restituée au Canada (cf. Québec aulne, Acadie-SPM verne, vergne). La représentation du mot dans la lexicographie générale est incohérente et lacunaire. Il conviendrait de distinguer trois grands ensembles, de l’est à l’ouest : 1° verne n. f. (Sud de la Haute-Marne, Bourgogne, Franche-Comté, SR, Ain, Savoie, Aoste, Isère, Velay, Ardèche) ; 2° verne n. m. (Saône-et-Loire, Ain, Rhône, Loire) ; 3° vergne n. m. [spor. f.] (Berry, Bourbonnais, Poitou-Charentes, Aquitaine, Midi-Pyrénées). Le fait que le mot soit toujours donné comme masculin dans la lexicographie générale explique probablement l’hapax relevé chez C. Bille (si l’adj. se rapporte bien à vernes seulement – v. rem. ci-dessus – et malgré Lengert 1994, qui affirme à tort que Hasselrot donne le type comme masc. pour Ollon) ; quant aux rares attestations de vergne dans notre corpus (tantôt m., tantôt f.), elles doivent aussi avoir subi l’influence des dictionnaires ; la carte 74 de l’ALF laisse voir une domination absolue du type verna n. f. dans les parlers de SR et de France voisine. On notera cependant la présence des formes vergna dans Bridel 1866 et vergne dans GaudyGen 1827 et HumbGen 1852 (non repris toutefois par SnellGen 1960 et DumontGen 1983). — Représentation du mot dans la lexicographie générale : « verne s. m. “sorte de bois qu’on nomme ordinairement aulne” » Rich 1732–1759 ; « verne s. m. “(vieux mot) aulne” » Trév 1743–1771 ; «  vergne, verne (sans marque rég.) » Ac 1798–1935 ; « vergne s. m. “ancien nom de l’aune” » Besch 1845, « verne s. f. “nom vulg. de l’aune” » ibid. ; « vergne s. m., verne (sans marque rég.) » Littré 1872 ; « verne s. m. “nom vulg. de l’aune dans certaines provinces” » Lar 1876, « vergne s. m. “syn. de verne ou aune” » ibid. ; « vergne s. m., verne ; dialect. » DG 1900 ; « vergne n. m., verne “nom vulgaire de l’aulne” » Lar 1904 ; « vergne n. m., verne “nom vulgaire donné quelquefois à l’aulne” » Lar 1933 ; « vergne n. m., verne “nom usuel de l’aune” » Lar 1964 ; « vergne n. m., verne “nom dialectal de l’aulne” » Rob 1964 ; « vergne n. m., verne “nom régional de l’aune” » GLLF 1978 ; « vergne n. m. (régional Centre) » GR 1985, 2001 ; « verne n. m. (régional) » GR 1985, 2001 ; « vergne, verne s. m. (région. Sud de la France, de la Vendée aux Vosges) » TLF.
Bibliographie. Lexicographie différentielle : « verne, vergne “sorte d’arbre” » GaudyGen 1827 ; « vergne s. m. “verne, aune, sorte d’arbre qui croît au bord des eaux ; nos campagnards lui donnent le genre féminin” » HumbGen 1852 ; « verne n. m. » ConnyBourbR 1852 ; « la verne » CalletVaud 1861 ; « verna, vergna n. f. » Bridel 1866 (att. patoises) ; « verne n. m. » PuitspeluLyon 1894 ; ConstDésSav 1902, p. 421b-422a s.v. vêrna (n. f. ; verne dans la métalangue) ; OdinBlonay 1910, p. 634b s.v. vêrna (n. f. ; verne dans la métalangue) ; Pier ; « vęrna n. f. » HasselrotOllon 1937, p. 256b (att. patoise) ; « verne n. m. » FleischJonvelle 1951, p. 35 ; FEW 14, 299b-300a, verno- 1 a α, β ; MassignonAcad 1962 (types verne, vergne n. f.) ; «  verne (sans ind. de genre) » SchüleNendaz 1963 ; « une verne » TuaillonRéfl 1976, p. 18 ; « du vergne » NouvelAveyr 1978 s.v. bergne ; « verne n. f. (au sud d’une ligne Vendée-Vosges) » RLiR 42 (1978), p. 186 ; « type verne (sans ind. de genre) » ALEC 1610 (points acadiens) ; « verne n. f. » TuaillonVourey 1983 ; « une vergne fr. rural » RouffiangeMagny 1983 (selon qui la finale n’est pas “phonétique”, mais analogique) ; «  vergne n. m. ou f. » RézeauOuest 1984 ; « ne pas valoir ni merde ni verne » TavDumExprBourg 1984 ; « verne n. m. » GononPoncins 1984 ; « verna, verne n. f. » MartinAost 1984 ; « vergne Ouest (sans ind. de genre) » RézeauBibl 1986 ; « verne n. f. » DurafHJura 1986 ; « verne n. f. » MartinPellMeyrieu 1987 ; « verne n. m. » MartinPilat 1989 ; « verne n. f. » DucMure 1990 ; « verne, vergne n. f. » BrassChauvSPM 1990 ; « verne n. f., souvent masculin (environs d’Autun et du Creusot) ; très vivant partout (sauf dans l’extrême nord de la Côte-d’Or) » TavBourg 1991 ; « vergne n. m., verne n. f. (Cévennes) » CampsLanguedoc 1991 ; « vergne n. m. » SuireBordeaux 1991 ; « vergne n. m. » BoisgontierAquit 1991 ; « verne n. m. » VurpasMichelBeauj 1992 ; « verne n. f. » MazaMariac 1992 ; « vergne n. m. » BoisgontierMidiPyr 1992 ; « verne n. f. (sud de la Haute-Marne) » TamineChampagne 1993 ; « verne n. f. » DuchetSFrComté 1993 ; « verne n. m. » VurpasLyonnais 1993 ; « verne n. f. » GagnySavoie 1993 ; « verne n. f. » FréchetMartVelay 1993 ; « verne n. f. » BlancRouatVill 1993 ; « vergne n. m. » DubuissonBonBerryB 1993 ; Lengert 1994 ; « verne, vergne n. m. ou f. » SalmonLyon 1995 ; « verne n. f. » FréchetAnnonay 1995 ; « verne n. m. » GermiChampsaur 1996 ; « verne n. m. ou f. » FréchetAin 1998 ; DRF 2001 s.v vergne.
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