poche n. f.
![]() ![]() 1.◆ (vieilli) Grosse cuillère en bois ou parfois en métal utilisée principalement dans les laiteries
(⇒ fruitière), servant entre autres usages à écrémer, à remuer le caillé, etc. Poche de bois. Poche à écrémer. Les vieilles poches de bois sont très recherchées
par les antiquaires. ⇒ casse Remarques.
1 « Quand on avait soif, on allait en puiser un peu [du petit-lait] à l’aide d’une “poche de bois” toujours à portée de main, et l’on buvait à même la cuiller. » P. Hugger, Le Jura vaudois, 1975, p. 148.
2 « Tout d’abord, avec une poche plate, le fromager traverse plusieurs fois horizontalement la masse de caillé “pour amener le chaud sur le froid”. Il écarte les couches supérieures de fromage brut, légèrement refroidies, et les
pousse vers le bord où elles s’enfoncent tandis qu’émergent à leur tour les couches
inférieures, plus chaudes. » Ibid., p. 173-174.
3 « Verser un demi-litre de lait chaud avec 100 g. de sucre sur 250 g. de pain coupé en
tranches fines dans un récipient que l’on couvrira aussitôt pour laisser ramollir
le pain. Le travailler ensuite avec une poche [en italique dans le texte] de bois et le réduire en pâte fine […]. » IttÇà, 1975, p. 174.
4 « J’achète vieille forme à beurre / vieille poche en bois et cuivre / baratte à beurre ancienne / vieux tranche-caillé » La Liberté, 3 juin 1977, p. 8.
5 « Commence ensuite la partie la plus délicate de la transformation. Le fromager empoigne
son “tranche-caillé”, sorte de grand rectangle de fer garni de lamelles qui provoque la formation des
grains. Il travaille la masse avec sa poche à écrémer […], pendant que son premier aide brasse le contenu du chaudron avec un
fouet de métal […]. » Coopération, 27 octobre 1977, p. 3.
2.◆ Grande cuillère creuse, métallique, à long manche, avec laquelle on sert la soupe,
les crèmes, le potage. Poche à soupe.
6 « Forcément, avec cette chette [= désordre, remue-ménage] qu’on avait faite dans cette
fontaine, il ne restait plus une main d’eau dans le bassin. Il aurait fallu faire
venir les femmes avec des poches à soupe pour écumer le restant ! » S. Chevallier, Ces Vaudois !, 1966, p. 133.
7 « Quand on y pénètre, on sent une odeur le plus souvent culinaire qui frappe les narines
d’un fumet robuste évoquant une souriante paysanne en tablier, la poche à la main. » Le Sillon romand, 9 janvier 1976, p. 20.
Localisation. Dans 〈Canton de Vaud〉, 〈Canton de Neuchâtel〉, 〈Canton de Berne (Jura Sud)〉 et 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉, poche domine largement (avec des var. phonétiques potse, potche dans 〈Canton de Berne (Jura Sud)〉 et 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉, non attestées à l’écrit ; on notera que dans 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉, le mot de français régional s’est substitué à un type patois différent [puti:əʀ]) ; dans 〈Canton de Genève〉, poche, pochon (v. rem.) et louche se partagent le terrain ; dans 〈Canton du Valais〉, le mot du français général louche est très fréquent, malgré quelques attestations de poche et surtout du type potson, posson, qui correspond au substrat dialectal (v. rem.) ; dans 〈Canton de Fribourg〉, louche est aussi très fréquent, mais il cohabite avec le type poche (souvent sous les var. phonétiques non francisées potse, potche, aussi relevées dans 〈Canton de Berne (Jura Sud)〉 et 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉). V. Voillat 1971, p. 232, 235.
Remarques. Mot de la sphère domestique, très rare dans la littérature ; on y rencontre plutôt
son équivalent du français de référence, louche. — Un type dér. pochon n. m., de sens proche, était jadis assez fréquent (cf. Merle d’Aubigné 1790, p. 129 ; GuilleDial 1825, p. 17 ; BonNeuch 1867 ; OdinBlonay
1910, p. 429b ; Pier ; ZumthorGingolph 1962, p. 257 ; IttCons 1970) ; on le rencontre
encore de nos jours à Genève, ainsi qu’en Valais (sous les formes non francisées potson, posson, empruntées au patois), mais c’est surtout en France, dans de très nombreuses régions
de l’Est, que l’on relève ce type. — Cf. encore le dér. pochée n. f. “contenu d’une poche” (Pier ; IttÇà 1975, p. 234 ; HeitlandNeuch, p. 46).
Commentaire. Premières attestations : ancien fribourgeois pochi (xve s.), poche (1446), v. FEW. Du lat. PŎPIA “louche” (IVe s.), n’ayant aucun rapport avec le fr. poche “partie d’un vêtement formant contenant” (d’origine germanique). Type largement attesté dans les parlers de l’est galloroman
(Bourgogne, Champagne, Meuse, Vosges, Franche-Comté, SR, Val d’Aoste, Savoie, Ain,
Rhône, Loire, Isère), v. FEW. En français régional, en plus de la Suisse romande,
il a été relevé en Haute-Marne, en Bourgogne, en Franche-Comté, en Savoie, dans le
Val d’Aoste, dans l’Ain et l’Isère (v. bibliographie ci-dessous et DRF). Au xixe s., il a fait un bref séjour comme terme non marqué dans quelques dictionnaires (“cuiller à long manche” Boiste 1803 à 1829 ; “sorte de cuiller profonde avec un long manche” Gattel 1841).
Bibliographie. SchneiderRézDoubs 1786 ; Merle d’Aubigné 1790, p. 129 ; DeveleyVaud 1808, n° 98 ;
Dumaine 1810, p. 253 ; GaudyGen 1820, 1827 s.v. pochon ; MulsonLangres 1822 ; DeveleyVaud 1824 ; GuilleDial 1825, p. 17 ; GuilleNeuch 1829-32 ;
PeterCacol 1842 ; GrangFrib 1864 (poche percée) ; BonNeuch 1867 ; « pouche “grosse cuillère en bois” » CorbisBelfort 1883 ; « poche “grande cuillère en bois” » CarrezHJura 1901 ; ConstDésSav 1902 (att. patoises seulement) ; J. Cornu, Romania 32 (1903), p. 126 ; WisslerVolk 1909 ; OdinBlonay
1910, p. 143a (poche percée “grande écumoire en cuivre pour écrémer”) et 429b (poche dans la métalangue définitionnelle, au côté de grande cuiller à potage, louche) ; Pier s.v. pochon ; FEW 9, 176a, pŎpia 1 ; Atlas de la Suisse, planches 28 et 28a, 1967 ; IttCons 1970 ; Voillat 1971, p. 232,
235 ; SchüleListeLar 1978 ; « Suisse » PR depuis 1984 ; « régional (Suisse, Savoie, Champagne) » GR 1985 et 2001 ; « poche, podze “sorte de petite pelle en bois, à fond plat et à poignée, pour prélever la crème sur
le lait” » DurafHJura 1986 ; GuichSavoy 1986 ; « région. (domaine franco-provençal) » TLF ; « Suisse » PLi depuis 1989 ; “louche à lessive ; louche pour le lait” DucMure 1990 ; « pôche “louche à potage”, très vivant partout » TavBourg 1991 ; « Haute-Savoie, Val d’Aoste pôche, pôtse à éfleurer “écrémoir” et VS, Haute-Savoie, Val d’Aoste pôche “louche” » BessatGMtBl 1991 ; HeitlandNeuch 1993, p. 46 ; « Suisse » NPR 1993 et 2000 ; « pôche ; pôche à écrémer ; pôche à effleurer ; pôche percée » GagnySavoie 1993 ; « poche “grande louche ; son contenu” » BlancRouatVill 1993 ; FréchetAin 1998 ; DRF 2001.
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