les citations
gerce n. f.
◆ Femme méchante, acariâtre. Sa proprio est une vraie gerce ! ⇒ gagui ; gribiche.
1 « Cery c’est la maison des fous, la grande cheminée, l’asile. Ah tu gueules, tu te roules par terre ? À Cery ! Tu rates ton suicide, tu broies du noir, tu bois ta paie, tu n’arrives pas à remonter la pente ? À Cery, à Cery, à Cery ! C’est la menace qui pèse sur les Vaudois, la trappe, les oubliettes où la signature d’un médecin, un rapport de police ou la dénonciation d’une gerce peuvent vous envoyer pour longtemps. Où est Jules ? Ils l’ont mis à Cery. Il est pas près d’en ressortir. Sa femme a signé le rapport ! » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 70.
2 « Le concierge est un brave homme, mais sa femme est une gerce. » Enq. CD/II, 1975-1981 (VD Arnex).
3 « La voisine, cette gerce, ne pense qu’à dire du mal des autres. » Enq. CD/II, 1975-1981 (NE Fenin).
4 « […] ah nom de Dieu de bordel ! de quoi est-ce qu’elle se mêle, cette vieille ; [on] devrait leur tordre le cou à ces serpents à sonnettes ! / – Bah ! qu’est-ce que tu veux te fâcher pour ça ; [elles] s’ennuient quand elles peuvent pas s’occuper de quelqu’un […]. / – Ah nom de Dieu de Bertranicus, cherche-leur encore des excuses, à ces gerces !… » G. Clavien, Le bel aujourd’hui, 1978, p. 16.
Remarques. Emploi plutôt sporadique. — En français de référence, ce mot désigne une espèce de teigne qui ronge les étoffes et les papiers (emploi très bien connu en Suisse romande), ou une fente dans le bois causée par la dessication.
Commentaire. La plus vieille attestation en Suisse romande montre que le mot y fut d’abord employé avec le sens de “femme” (v. RouxArgSold 1921) ; l’attraction paronymique de garce, doublée d’une dérivation synonymique sur teigne “personne méchante, hargneuse”, a entaché le mot d’une connotation franchement péjorative et l’a ancré à la famille de gerce “teigne”, mais il n’est pas sûr que le mot soit à rattacher dès l’origine au zoonyme. L’emploi du mot gerce pour désigner une jeune fille, une femme, une maîtresse ou une prostituée appartient en fait au registre argotique du xixe s. et de la première moitié du xxe en France ; les rattachements étymologiques proposés sont divers (Esnault gerce “brebis qui n’a pas encore porté” dans certains parlers de l’Ouest ; Sainéan gerce connotant l’usure, la perte de la fraîcheur du teint ; Wartburg gerce “pudendum muliebre” parallèlement à fendasse, fente, brèche, etc., v. FEW 2, 625b, charaxare et note 6).
Bibliographie. « fille publique » SainéanParis 1920 ; « femme » RouxArgSold 1921 ; « prostituée, femme de bas étage » BauchePop 1928 ; SchüleNendaz 1963 ; « jeune maîtresse » EsnaultArg 1965 ; « méchante femme » IttCons 1970 (> DFV 1972) ; « jeune fille, jeune femme de petite vertu ; par extension : toute fille » CellardRey 1980 ; GR 1985 ; « jeune fille ou jeune femme ; maîtresse ; épouse » ColinArgot 1990 ; Lengert 1994 ; GR 2001.
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