musique à bouche n. f.
◆ Harmonica. Jouer de la musique à bouche. Joueur de musique à bouche. ⇒ orguette.
1 « Une plante verte sur une sellette, une poupée à cheveux d’argent étalée sur le divan
mauresque, et au milieu de tout ce luxe, attendant les visites de Victor qui avait
un commerce était-ce bien moi la Wilma qui gardait les vaches, qui descendait le chemin
pierreux pour aller à l’école, et le Quiton jouait de la musique à bouche ? » C. Colomb, Le Temps des anges, 1962, p. 72.
2 « Père était là-bas depuis quelques jours. Il vendangeait, préparait les charges, attendait,
vers les dix heures, l’arrivée de la caravane. Ils étaient vingt, trente, assis sur
les mulets, riant, heureux, descendus de la montagne, passant le Rhône, remontant
vers les villages du coteau vigneron. Ils s’appelaient Amélie, Ernestine […], Jean
ou Pierre, tous rieurs, tous à l’âge de la danse, les dimanches, un peu en cachette,
chez Caroline ou Baptiste. Et les garçons avaient une musique à bouche dans la poche de leur veston. » M. Zermatten, Les Sèves d’enfance, 1968, p. 99.
3 « Montez ici dans la camionnette à côté de moi, Émilienne, et ce soir on va faire un
tour ensemble, on va bien s’amuser, les deux*, vous verrez, [je] vous jouerai de la musique à bouche. » G. Clavien, Un Hiver en Arvèche, 1970, p. 174.
4 « Mes Amis / Faites la révolution sac au dos, / les pieds nus dans une gare, / en mendiant
/ avec une musique à bouche, / avec un bambou / et du soleil noir au bout de la plume / de l’encre qui éclairera
le monde. » M. Chappaz, Les Maquereaux des cimes blanches, 1976, p. 44.
5 « Vous jouez d’un instrument qui s’appelle harmonica et qu’on appelait dans mon enfance
musique à bouche. » TSR, Un jour une heure, 28 mars 1978.
6 « Le dimanche matin, jour des élections, les Rouges déléguèrent une mission à la loge
des Esserts. Ils trouvèrent Aloïs fin prêt, rasé de frais, endimanché, pur comme la
rosée du matin. Assis sur l’auge, il jouait de la musique à bouche [en italique dans le texte] en attendant ses Noirs bienfaiteurs. » ChapuisBonfol, 1985, p. 27.
◇ (att. isolée comme sobriquet ethnique ; allusion à la faconde que l’on prête volontiers
aux Genevois)
7 « Jadis, le Genevois moquait son voisin lémanique* et l’appelait bêchois, à quoi le bon Vaudois répondait : musique à bouche. » G. Duttweiler, Joyeusetés du Pays de Vaud, 1972, p. 30.
Commentaire. Première attestation : 1907, C.-F. Ramuz (« il y en a un qui sort sa musique à bouche et se met à jouer un air », Les Circonstances de la vie, p. 54 [éd. de 1967]). Syntagme également attesté en français régional de Franche-Comté, de Savoie
et de Haute-Provence (« Il dressa en face de mes yeux une de ces musiques à bouche qu’on achète dans les foires : du fer et du bois. » J. Giono, Un de Baumugnes, 1929, p. 119) ; connu en outre en Belgique (mais “a beaucoup vieilli” ; M. Francard, comm. pers., 14 août 1996), au Canada, à Saint-Pierre et Miquelon et en Louisiane. Il pourrait
être né à partir d’emplois du mot musique désignant n’importe quel instrument ou un instrument en particulier, usage bien attesté
dans plusieurs parlers galloromans (v. FEW ; MazaMariac 1992, BrasseurNantes 1993) ;
v. encore AcC 1836 et Ac 1935 (« musique se dit encore, familièrement, d’un jouet d’enfant qui imite les sons de tel ou tel
instrument. »).
Bibliographie. Clapin 1894, p. 362 ; Mâcon 1926 ; GPFC 1930 ; MeijerEnq 1962, p. 30, 58, 137 ; MassignonAcad
1962, n° 1887 ; FEW 6, III, 264b, musica ; SchüleListeLar 1978 ; PoirAngl 1978, p. 66 ; PoirCréol 1979, p. 414 ; « en Suisse » Lar 1979 ; « en Suisse » PLi depuis 1980 ; Pid 1983, 1984 ; TLF 11, 1257b ; DaigleCajun 1984 ; GR 1985 ; ChapuisBonfol
1985, p. 24 ; GuichSavoy 1986 ; GrioletLouisiane 1986 ; BrassChauvSPM 1990 ; DromardFrComt
1991 ; MazaMariac 1992 ; DQA 1992 ; DFréQ 1992 ; BrasseurNantes 1993 ; Lengert 1994 ;
Belg 1994 ; ThibQuébHelv 1996, p. 345 ; GR 2001.
Nathalie BACON
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