miser v. tr.
1.◆ Mettre, vendre aux enchères. Miser son bétail, son chédail*. Miser des coupes de bois. Miser du vin. (En construction factitive) Faire miser du foin. ⇒ mise 1 ; miseur 1.
1 « Payerne ? Prenez des tonnes de cochon ; de la saucisse, des atriaux*, du lard, des saucissons lourds. Prenez des volailles grasses, oies et poulets des
basses-cours corçallines*, prenez des confitures et de la gelée de framboise, des biscuits aux œufs et au kirsch,
prenez des bricelets* et des gâteaux* à la courge, ajoutez le vin de la Bellettaz qu’on mise chaque année à la Vente (c’est le vignoble que la commune possède sur le Léman, héritage
des abbés et des solides administrateurs bernois) […]. » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 194.
2 « Madame Jotterand, affectée par tant d’épreuves, avait donné son consentement pour
miser les bêtes, mais elle ne l’avait pas fait de gaieté de cœur. » A.-L. Chappuis, Juste avant l’orage, 1973, p. 191.
3 « La Municipalité [de Cossonay] fera miser, samedi 20 avril 1974 dès* 14 h. au bois du Sépey ; environ 100 stères de hêtre / plusieurs lots de dépouilles
/ Rendez-vous est donné aux miseurs* à la lisière du bois, par le chemin des Terrailles dès* Cossonay. » Feuille des avis officiels du canton de Vaud, 19 avril 1974, p. 979.
4 « [titre] Une bonne récolte, mais peu abondante / Payerne a renoncé à miser ses vins » Tribune-Le Matin, 1er février 1979, p. 9.
↪ V. encore s.v. chédail.
◇ (souvent employé en tournure passive)
5 « Une fois Dubois servi – un nom prédestiné – la mise* était terminée. La moitié des 230 stères avait trouvé preneur. L’an passé, tout avait
été misé. » Le Sillon romand, 10 janvier 1975, p. 3.
6 « Après le bétail, il sera misé 20 tonnes de foin et regain 1re qualité. » Le Sillon romand, 10 janvier 1975, p. 8.
7 « 39 000 litres de vin d’appellation Villette, Epesses ou Calamin seront misés. » 24 heures, 17 février 1982, p. 17.
◇ (en emploi abs.)
8 « La commune offrait un verre à ceux qui avaient misé. Sitôt que c’était adjugé, venait un litre par-ci, par-là. » Cl. Bérard, Bataille pour l’eau, 1976 [1963], p. 49.
◇ Acheter par voie d’enchères.
9 « Tout cela défilait dans la tête du grand Max qui, en ce soir d’avril, se dirigeait
vers la maison de commune pour y miser quelques charrois de bois. » A.-L. Chappuis, À petit feu, 1964, p. 33.
10 « Alors, c’est moi qui ai fait comme ça. J’ai misé toutes les vaches. Celles qu’il fallait garder. » A.-L. Chappuis, Juste avant l’orage, 1973, p. 228.
11 « Quand on misait un cheval à l’armée, on recevait non seulement son livret* de service personnel mais le livret de service du cheval. » RSR, 9 septembre 1976.
◇ Demander une certaine somme pour effectuer un travail, une tâche (ici en emploi abs.).
12 « Ces gardes n’étaient pas des corvéables* comme ceux que l’on désignait pour la surveillance du bisse*, entre le Levron et Chardonnay. Le poste était mis chaque année en soumission, ou
à l’encan, à la criée publique, et les amateurs, des jeunes le plus souvent, misaient à tant le mètre carré […]. » Cl. Bérard, Bataille pour l’eau, 1976 [1963], p. 78.
◇ misé, ‑ée part. passé-adj. Qui a fait l’objet d’une mise ; acheté, vendu aux enchères. Cheval misé. Immeuble misé.
13 « La voyant accourir, il s’inquiéta et fut bien surpris d’apprendre que la vache misée au fermier allait mettre bas. » A.-L. Chappuis, À petit feu, 1964, p. 47.
14 « [légende] Les bœufs de la Fête, avec leur joug, misés à Châtillens. » Tribune-Le Matin, 17 août 1977, p. 9.
◇ Miser sur (qch.) loc. verb. Proposer une certaine somme pour l’acquisition de (qch.), à une vente aux enchères. Miser sur qn, enchérir sur qn.
15 « [Ce qu’on a vu en 1994] Avant la vente aux enchères de la boucherie cramée, le maire
C. S., l’A. P. et le W. C. faire le tour des ruines, lampes de poche à la main, pour
voir sur quoi ils pourraient miser. » Le Rai-Tiai-Tiai aidjolat [journal de carnaval, JU Ajoie], n° 18, 1995, p. 7.
◇ (autrefois) Se faire miser loc. verb. Être l’objet d’une enchère au rabais (en parlant de personnes à la charge d’une commune).
16 « Le premier jour de la neige les invalides se faisaient miser. La Commune payait. Le président* les adjugeait aux moins offrants. C’étaient les enchères décroissantes. Un vieillard,
des simplets, les grands estropiés : cinq francs par jour. » M. Chappaz, Portrait des Valaisans, 1965, p. 161.
Localisation. Partout sauf 〈Canton de Genève〉.
2.◆ Au jeu de la mise*, annoncer un certain nombre de points. Miser 350 points. ⇒ mise 2 ; miseur 2.
17 « Le donneur distribue trois fois quatre cartes. Le joueur prioritaire a le droit de
prendre le jeu à son compte, contre ses deux partenaires, en misant au moins 350 points. » Règlement suisse de jass, 1983, p. 32.
◇ (en emploi tr. abs.)
18 « Le second jeu d’une partie est distribué par celui qui a misé ; la carte inférieure constitue l’atout et ne peut pas être prise. » Règlement suisse de jass, 1983, p. 33.
Commentaire. 1. Première attestation : VD 1694 (v. Pier). Frm. miser v. intr. “enchérir”, attesté pour la première fois en 1669 (v. FEW), est donné sans marque dans Lar 1874-1963
(> TLF), mais est absent de GLLF, Rob et GR. Littré le présente comme provincial,
et on le relève effectivement à Lyon, dans le Doubs, en Savoie et en Ardèche (v. bibliographie
ci-dessous). La spécificité romande consiste à utiliser ce verbe en emploi transitif,
avec comme régime l’objet à vendre (et non la somme proposée ou demandée) ; cf. aussi Lyon miser une calèche jusqu’à cinquante francs (Puitspelu 1894). — 2. Innovation suisse romande non attestée à date ancienne et sans tradition lexicographique.
Correspond à l’all. de Suisse steigern v. intr. ou bieten v. tr.
Bibliographie. GaudyGen 1827 ; HumbGen 1852 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch 1867 ;
« (dans quelques provinces) enchérir » Littré 1867 ; « v. a. et n. surenchérir » PuitspeluLyon 1894 ; WisslerVolk 1909 ; OdinBlonay 1910, p. 355a ; Pier, PierSuppl ;
« v. a. et n. enchérir, mettre au jeu, verser l’enjeu d’une partie » BoillotGrCombe 1929, p. 220 ; BiseHBroye 1939, p. 305 ; FEW 6, II, 188b, mĬttĔre I 2 a β d’(où la spécificité de l’emploi transitif romand n’a été notée que pour les patois) ;
IttCons 1970 ; SchüleListeLar 1978 ; TLF s.v. miser A ; GR 1985, 2001 s.v. miser (où la répartition des données romandes sous 1 et 2 ne se justifie pas) ; « enchérir dans une vente ; se porter acquéreur ; consentir un sacrifice d’argent pour
acheter ou obtenir quelque chose » GuichSavoy 1986 ; PLi depuis 1988 ; Lengert 1994 ; « v. tr. enchérir (il a misé cent francs) » FréchetAnnonay 1995.
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