crêt n. m.
◆ Élévation de terrain (monticule, colline, sommet, proéminence) ; pente plus ou moins
raide, terrain escarpé. Descendre le crêt. ⇒ combe.
1 « Dans la descente des “crêts”, le char de foin peut pousser, il [le cheval] se raidit sur ses jambes. » W. Dubois, En poussant nos clédars, 1959, p. 22.
2 « Les corbeaux tournoient loin dans le vent. Le ciel fond. Le soleil crépite dans les
chardons griffus des crêts. » J. Chessex, La Tête ouverte, 1962, p. 71.
3 « On les avait regardés faire, on se détournait d’eux pour mieux rire. On déclarait
à la cantonade qu’ils étaient un peu fous. On leur avait vendu, pour trois fois rien,
tout le crêt qui n’était à l’époque qu’un immense pierrier*. » A. Layaz, Malvallée, 1976, p. 70.
4 « Puisqu’il y avait des crêts, le village de Liddes, selon l’usage et les nécessités de l’époque, a sans doute été
bâti sur la calotte ou sur les flancs de l’un de ceux-ci. […] Le paysage que nous
admirons aujourd’hui serait encore celui de ce temps-là avec le bourg de Liddes sur
son crêt et l’Herbière sur l’autre rive, si la Dranse avait coulé toujours bien sagement dans
son lit. » V. Darbellay et al., Liddes, 1976, p. 187-188.
5 « M. J. B., 70 ans, ancien maire qui circulait à vélomoteur au village descendant un
crêt a vu ses freins lâcher et a terminé sa course contre une barrière de pâturage. » L’Impartial, 7-8 août 1976, p. 7.
6 « La Marie Bouchère habitait Sur-la-Hade, un crêt d’où la vue embrasse le village avec son église et s’étend jusqu’au poste de douane
de Beurnevésin-Pfetterhouse. » B. Chapuis, Une de Bonfol, 1985, p. 88.
↪ V. encore s.v. pierrier.
◇ Très fréquent dans des constructions toponymiques, le plus souvent avec majuscule
(v. GPSR) ; avec minuscule dans l’exemple suivant :
7 « L’endroit domine les pâtures du crêt de l’Envers et toutes les maisons de la paroisse. » J.-P. Monnier, L’Allègement, 1975, p. 91.
Remarques. En français de référence, crêt est un technicisme des géologues et des géographes, défini comme un “escarpement monoclinal, en structure sédimentaire généralement plissée correspondant
à la superposition d’un ensemble de couches résistantes (calcaires, grès, etc.) à
des couches tendres sous-jacentes” (TLF). Ce terme, introduit dans la nomenclature géologique par J. Thurmann en 1832,
ne correspond que rarement à l’acception traditionnelle du terme dans les régions
où il est autochtone (v. GPSR et ci-dessous). Toutefois, le terme régional, dûment
marqué comme tel, fait son apparition relativement tôt dans la lexicographie française ;
cf. Lar 1900 : « crêt ou crest […] Montagne ; sommet. (Se dit dans quelques départements.) ».
Localisation. Dans 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉, aux côtés de la forme crêt, on trouve aussi très fréquemment la forme cras, empruntée au patois (« au bas du cras du Soleil » Le Rai-Tiai-Tiai aidjolat [journal de carnaval, 〈Canton du Jura (Jura Nord)〉 Ajoie], n° 18, 1995, p. 33).
Commentaire. Régionalisme de statut. Premières attestations : 1147 (toponyme Altcrest, MDR 3e série, t. XV, p. 157), 1150 (id. ; vidimus de 1302 ; v. GPSR), 1210 (toponyme crest Roset, v. Pier). Doublet masculin de crête ; type attesté comme appellatif dans le français régional d’une grande partie de
l’est du domaine galloroman (Franche-Comté, Suisse romande, Savoie, Lyonnais), avec
des sens moins techniques qu’en français de référence : cf. par ex. Pontarlier “lieu plus élevé que les autres ; petite colline” ; Annecy, Albertville “rocher saillant, mamelon ; ressaut de montagne ; renflement de terrain sur une colline” ; Lyon “montagne, sommet d’une montagne” ; Beaujolais “sommet, hauteur, mont” ; Pilat “petite montagne”. Comme appellatif dialectal ou comme toponyme, ce type connaît une extension qui
déborde le domaine galloroman (« du Massif Central aux Alpes grisonnes et des Vosges à l’Italie septentrionale » GPSR).
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