les citations
porreau n. m.
◆ Plante potagère de forme allongée, au pied blanc et aux feuilles vertes, consommée de préférence en soupe, en gâteau*, en papet* ou en gratin. Papet* aux porreaux.
« La saucisse* au foie et la saucisse* aux choux se servent avec le papet* de porreaux, la salade rouge [= salade de betteraves]. » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 109.
(fig.) Avoir du porreau, avoir de la chance (GE).
Remarques. La forme standard poireau est aussi d’emploi courant dans l’usage oral, et d’emploi quasi exclusif à l’écrit. — Au xixe s. et au début du xxe, de très nombreux ouvrages donnent la forme pour(r)eau, qui semble donc être à cette époque la vraie forme populaire du mot en français de Suisse romande (elle a aussi été relevée à Lyon et à Langres) ; porreau n’apparaît (au côté de poireau) que comme équivalent standard (cf. MolardLyon 1803 ; DeveleyVaud 1808, n° 163 ; Dumaine 1810, p. 254 ; GaudyGen 1820, 1827 ; MulsonLangres 1822 ; DeveleyVaud 1824 ; PeterVoc 1828, 1842 s.v. pourot ; HumbGen 1852 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch 1867 ; Pier).
Commentaire. Archaïsme ; cette forme est encore donnée sans aucune marque dans Li 1868, Ac 1884, DG 1898, Lar 1903, Lar 1932, Lar 1949 et même FEW (« mfr. nfr. seit 1530 » [publié en 1959]). Il faut attendre aussi tard que 1961 (Rob) pour trouver une première marque attestant de son caractère non standard ; cela dit, le vieillissement de la forme en français central est certainement plus ancien que sa prise en charge par la lexicographie, et le fait que certains ouvrages différentiels (Clapin 1894 ; Dionne 1909 ; BoillotGrCombe 1929 ; Pohl 1950) la relèvent déjà plusieurs années auparavant en constitue une preuve indirecte. L’évincement de porreau au profit de poireau (forme analogique [influence de poire] originaire de la région parisienne) est loin d’être achevé dans l’est galloroman : porreau est encore vivant en Belgique (Michel Francard, comm. pers., 15 août 1997), en Lorraine, en Franche-Comté, en Suisse romande, dans l’Ain, le Rhône, la Loire, l’Isère, le Velay et l’Ardèche. Sa vitalité varie toutefois d’une région à l’autre (v. bibliographie ci-dessous). On remarquera que l’histoire de ce type lexical en Suisse romande semble se résumer à un continuel processus d’alignement sur la norme, que l’on pourrait schématiser ainsi : pourreau > porreau > poireau (v. rem. ci-dessus). La forme porreau a probablement été préférée dans un premier temps à poireau en raison de sa plus grande proximité avec la forme pourreau, ou même avec la forme patoise porå̩ (v. par ex. OdinBlonay) ; puis, dans une seconde étape relativement récente, elle a dû céder sa place (en particulier dans la langue écrite) à poireau, seul terme non marqué dans la lexicographe française de la seconde moitié du xxe siècle. Le processus n’est d’ailleurs pas achevé et porreau survit bien à l’oral. — Canad. poreau (Clapin 1894, Dionne 1909 > FEW > Lengert) est complètement tombé en désuétude dans l’usage contemporain.
Bibliographie. « poureau et poreau » OdinBlonay 1910, p. 427a ; « pŏ̀rŏ̀ » BoillotGrCombe 1929, p. 247 ; « cette prononciation archaïque est encore courante en Belgique, dans le Hainaut notamment » Pohl 1950 ; FEW 9, 194b-195a, pŎrrum I 1 ; « forme […] aujourd’hui dialectale et populaire » Rob 1961 ; « ancienne orthographe [sic] de poireau » Lar 1963 ; IttCons 1970 ; « forme […] aujourd’hui régionale et populaire » GLLF 1976 ; « forme […] aujourd’hui dialectale et populaire » GR 1985, 2001 ; « régionalisme inconscient » DurafHJura 1986 ; « poreau Auvergne-Limousin » RézeauBibl 1986 ; MartinPellMeyrieu 1987 ; « var. vieillie ou région. […] ; survit encore dans les parlers provinciaux » TLF ; « usuel à partir de 60 ans, en déclin au-dessous » MartinPilat 1989 ; LanherLittLorraine 1990 ; DromardFrComté 1991 s.v. porot ; MazaMariac 1992 ; « bien connu au-dessus de 40 ans, en déclin rapide au-dessous » VurpasMichelBeauj 1992 ; « bien connu » VurpasLyonnais 1993 ; « globalement connu et plus vivant chez les hommes que chez les femmes » FréchetMartVelay 1993 ; « parfois encore employé au-dessus de 50 ans, encore connu à 20 » BlancRouatVill 1993 ; Lengert 1994 ; RobezMorez 1995 ; SalmonLyon 1995 ; « globalement connu » FréchetAnnonay 1995 ; « globalement connu » FréchetAin 1998.
Copyright © 2022, tous droits réservés