Dictionnaire suisse romand

les citations

courater v. tr., intr. (parfois couratter)

1.◆ (v. intr.) Courir çà et là, à droite et à gauche. Courater dans tous les sens.

1 « Ah si les regards lourds et les mains lestes pouvaient se changer en écus, les sommelières* seraient riches ! Mais elles courattent dans la fumée, le soir quand c’est “passé l’heure” en soupirant de fatigue […]. » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 83.

2 « Une grosse ourse débonnaire poussait du museau trois oursons à collier blanc qui courataient, se roulaient, se sautaient dessus […]. » J. Chessex, L’Ogre, 1973, p. 185.

3 « Bref, elle se démène et courate de gauche et de droite comme une guêpe dans une bouteille de sirop. » IttÇà, 1975, p. 283.

4 « Et pensons également aux réactions possibles de ce 3e âge gambadant et jeune comme le petit-fils d’Hérode lorsque nos parlementaires lui refuseront une ixième augmentation de ses rentes. Ça “couratera” sec et dru devant le Palais fédéral* ! » Tribune-Le Matin, 10 octobre 1976, p. 11.

5 « Elle va, elle vient, elle courate. » RSR I, 12 décembre 1976 (émission Restons vaudois).

2.◆ (v. tr.) Poursuivre, faire la chasse à, courir après. Le chien courate les pigeons sur la place.

6 « Ce renard couratait les génisses. » RSR I, 28 août 1977 (VD Saint-Saphorin-sur-Morges).

◇ (Avec régime prépositionnel) Il courate après ses bêtes.

7 « Comme des matous […] qui couratent après leur ombre, après leur queue. » RSR, 2 juin 1976.

3.◆ (v. tr.) Fréquenter assidûment. Courater les filles.

8 « Grand-mère disait souvent à l’aîné qui passait ses soirées à courater les filles : – Fi ! N’as-tu pas honte de rentrer aux petites heures, avec le travail qu’on a ! » IttÇà, 1975, p. 194.

◇ (v. tr. abs.) Rechercher constamment des aventures amoureuses. Il courate sans arrêt, celui-là !

Localisation. 1 : 〈Canton de Vaud〉, 〈Canton du Valais〉, 〈Canton de Genève〉, spor. 〈Canton de Neuchâtel〉 ; 2 : 〈Canton de Vaud〉, spor. 〈Canton de Neuchâtel〉 ; 3 : 〈Canton de Vaud〉, 〈Canton de Genève〉. Il s’agit essentiellement d’un mot vaudois.

Remarques. GE a connu une forme couriater (Gaudy, Humbert), qui ne semble plus attestée dans l’usage contemporain. — Cf. encore courateur, ‑euse n. m./f. “personne qui cherche des aventures amoureuses” (v. GPSR 4, 428a ; CuenVaud 1991) et couratier, ‑ère id. (v. GPSR 4, 428b ; RézeauDuPinAng [1746-1748] ; aussi attesté dans le Haut-Doubs, l’Ain, dans la Loire [Roanne], en Isère [Villeneuve sur Marc] et en Savoie) ; ces mots sont encore mentionnés par quelques témoins çà et là.

Commentaire. Première attestation : GE 1560 (courrater, v. Pier, GPSR). Transposition en français régional d’un mot dialectal, dérivé formé sur courir, relevé dans l’est et le centre du domaine galloroman. Le mot est aussi très bien attesté en français régional de France, avec les mêmes sens qu’en Suisse romande : cf. Centre “être dissipé, aller çà et là”, Doubs “courir après quelqu’un”, Pontarlier “courir après une personne”, Morez (Haut-Jura) “chercher à courtiser une femme”, Ain “être toujours en route ; avoir de nombreuses aventures sentimentales”, Savoie “courir les filles ou les garçons”, Meyrieu (Isère) “courir sans cesse, de ci de là”, Villeneuve de Marc (Isère) “id. ; [v. tr.] poursuivre (qn) de ses assiduités”, Lyon “courir ; aller et venir ; polissonner”, Pilat “se déplacer souvent”, Beaujolais “être toujours en route ; avoir de nombreuses aventures sentimentales”, Velay “se déplacer souvent ; courir les filles ou les garçons”, Poncins (Loire) “courir de ci, de là, fréquemment” ; Roanne (Loire) “aller et venir sans cesse, sortir constamment” ; Annonay (Ardèche) “se déplacer souvent, voyager ; courir les filles ou les garçons”. V. aussi DRF.

Bibliographie. GaudyGen 1820, 1827 s.v. couriater ; HumbGen 1852 s.v. couriater ; CalletVaud 1861 ; JaubertCentre 1864 ; BonNeuch 1867 ; BeauquierDoubs 1881 ; PuitspeluLyon 1894 ; CarrezHJura 1906 ; VachetLyon 1907 ; OdinBlonay 1910, p. 270b, 299b ; Pier, PierSuppl ; CollinetPontarlier 1925 ; BoillotGrCombe 1929, p. 198 ; PrajouxRoannais 1934 ; MiègeLyon 1937 ; FEW 2, 1569b et 1570a, cŬrrĔre I 1 b β et c ; GPSR 4, 427a-428a ; IttCons 1970 ; GononPoncins 1984 ; RézeauBibl 1986 ; GuichSavoy 1986 s.v. courate, couratier ; DurafHJura 1986 s.v. couratier ; MartinPellMeyrieu 1987 ; MartinPilat 1989 ; DondaineMadProust 1991, p. 69 ; ColinParlComt 1992 ; VurpasMichelBeauj 1992 ; FréchetMartVelay 1993 ; GagnySavoie 1993 ; BlancRouatVill 1993 ; Lengert 1994 ; OffScrabble 1995 ; RobezMorez 1995 ; FréchetAnnonay 1995 ; SalmonLyon 1995 ; FréchetAin 1998 ; DRF 2001.