les citations
cougner v. (var. cugner)
1.◆ (v. tr., tr. abs.) Pousser, presser, serrer (en particulier dans une foule, pour se frayer un chemin). Cougnez pas !
1 « Un jour que j’étais descendu à Moudon, je vois un grand attroupement devant le Café du 24 Janvier. Qu’est-ce qui arrive ? Des femmes criaient. Je m’approche, je cougne un peu, l’Apôtre était au milieu qui se battait avec un vieux ! » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 47.
2.◆ se cougner v. pron. Se presser, se serrer.
2 « Êtes-vous déjà allé dans certain café de la rue de la Tour après le marché ? Toute la campagne vaudoise s’y cougne, s’y apostrophe, la monnaie sonne dans les tabliers bleus, salut Gaston, salut Emile, tu viens boire ta camomille ? » J. Chessex, Portrait des Vaudois, 1969, p. 170.
3 « On se cougne pour faire de la place. » Enq. CD/I, 1976 (VD Ste-Croix).
3.◆ cougné part. passé-adj. Tassé, serré. Cougnés comme des sardines.
4 « La “Fête” s’étale sur deux jours et sa surface a doublé : on y sera beaucoup moins “cougné” que l’an passé ! » Nouvelle Revue de Lausanne, 27 juin 1969, p. 9.
5 « On sera pas trop cougnés dans ces dortoirs. » Écolier vaudois, 1976.
6 « Les “poules élevées en plein air”, elles, sont forcément heureuses, direz-vous. Bof ! “En plein air”, au sens strict, cela veut juste dire qu’elles n’ont pas de toit sur la tête. Mais qui vous dit qu’elles ne sont pas “cougnées” comme des sardines ? » Le Nouveau Quotidien, 23 janvier 1995, p. 2.
7 « J’avais 15 ans, dit-elle, et nous l’avions visité avec l’Êcole de commerce [le Comptoir* de Lausanne]. Et j’y suis retournée seule. C’était un peu “cougné”, et plutôt moche, tant il y avait de stands. » 24 heures, 12 septembre 1995, p. 29.
Localisation. Canton de Vaud ; Canton de Genève (où il semble commencer à vieillir). D’après nos témoins, Canton de Fribourg connaît encore bien le mot, mais sous la forme cugner.
Remarques. Cf. encore le déverbal cougne n. f. “foule très compacte, cohue” (« À Lausanne, tielle cougne ! tiel trafi ! C’était bien plus pi qu’à la Fête des vignerons à Vevey ! » Gorgibus, Grand Frédéri, 1892, p. 55 ; VD 1946, v. Bossard et Desponds dans FEW 2, 1531b, cŬnĔus I 1 a β ; encore signalé par ArèsParler 1994).
Commentaire. Même type que le fr. cogner, qui n’est toutefois guère attesté dans la langue centrale avec ce sens ; dans les parlers régionaux, en revanche, on trouve de nombreux sens étroitement apparentés au sens romand, en particulier dans l’Est (v. FEW). En SR, l’absence d’occurrences anciennes, de même que la variété des formes régionales en usage au xixe s., montrent qu’il s’agit d’un dialectalisme : VD, GE [kuɲi]français régional cougner, FR [kyɲi]français régional cugner (GrangFrib), NE [kweɲi]français régional couégner, coigner (BonNeuch, Pier ; aujourd’hui désuet). Attesté avec ce sens à Genève depuis 1852 (on trouve déjà cougner dans GaudyGen 1820, 1827 mais il y est simplement glosé par “cogner”), il est cependant bien mieux implanté dans VD, où on le relève même dans la langue littéraire. — Selon A. Desponds, en français régional vaudois le verbe a aussi le sens de “faire l’amour” (FEW 2, 1533a ; GPSR 4, 148a).
Bibliographie. HumbGen 1852 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch 1867 ; Pier, PierSuppl ; FEW 2, 1535a, cŬnĔus I 2 a α ; GPSR 4, 147b-148a s.v. cogner 3° et 7° ; IttCons 1970 (> CuenVaud 1991) ; Lengert 1994 ; ArèsParler 1994.
Pierre KNECHT
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