bonne-main n. f. (pl. bonnes-mains)
◆ Pourboire, gratification. Donner, recevoir une bonne-main. Deux francs de bonne-main.
1 « Papa donne 50 centimes de bonne-main. » MeijerEnq 1962, p. 172.
2 « Il y a de gros propriétaires qui sont pleins d’argent, mais dans vingt ans, ils n’ont
jamais donné 50 centimes de bonne main à leurs bergers. » P. Hugger, Le Jura vaudois, 1975, p. 224.
3 « La meilleure clientèle que j’ai, c’est les dames. Il y en a quelques-unes qui me donnent
une bonne-main quand elles me payent ; elles me disent : allez boire un verre. » RSR, 11 novembre 1976.
4 « L’introduction du service compris n’a suscité, en revanche, aucune question ni aucune
réflexion de la part des participants. Rappelons toutefois que, dès* le 1er avril prochain, les tarifs des salons de coiffure seront adaptés de 15% […]. Précisons
bien qu’il ne s’agit nullement d’une augmentation des prix en soi mais uniquement
de l’adjonction de la bonne main dans le prix du service tel qu’il est fixé actuellement. » La Liberté, 11 mars 1980.
5 « Depuis 1824, le valet fonctionne comme factotum et serviteur dans l’auberge. Il est
élu à vie. Il touche différentes bonnes-mains [en ital. dans l’original] pour ses divers services […]. » M.-Th. Torche-Julmy, H. Foerster, L’Abbaye des Maçons de Fribourg, 1981, p. 68.
6 « Qu’est-ce que je vais faire si c’est plus cher… moi, qui n’ai qu’un franc… et puis,
je n’ai même pas pensé à la bonne-main ! » A. Maillard, C’était au milieu du siècle, 1997, p. 180.
Remarques. Donné comme « rare » dans TLF et « vx ou régional (Suisse) » dans GR 1985. — L’ancien synonyme tringuelte (de l’all. Trinkgeld, de même sens, v. Pier ; aussi connu en Wallonie sous la forme dringuelle, v. Belg 1994) ne s’entend plus dans l’usage contemporain ; en revanche, le mot du
français général, pourboire, est bien connu et couramment employé.
Commentaire. Plus ancienne attestation : 1829-32, GuilleNeuch (qui le présente comme un mot du
fr. de France pour corriger le germanisme Trinquelt : « Pourboire ; quelquefois on dit aussi en France bonne-main »). Selon TLF (très peu vraisemblablement), « de l’expr. être en bonnes mains (fur.) quand on ne veut pas reprendre une chose qui est tombée entre les mains d’une personne
à qui on veut en faire un présent » ; mais le mot semble plutôt être un emprunt à l’italoroman, v. infra. Bien attesté
dans les patois (cf. boūna man dans GPSR 2, 492a), il est très fréquent en Suisse romande ; mais on ne le rencontre
guère en France. TLF cite un exemple de 1942 dû à A. Arnoux, auteur né à Digne (Alpes-de-Haute-Provence) ;
RézeauBibl fournit un exemple de 1978 tiré d’un auteur savoyard ; Gagny et Guichonnet
l’attestent pour la Haute-Savoie et la Savoie, RobezMorez pour le Jura français. On
trouve en outre dans le FEW sav. bonaman, Marseille bonne main, et un renvoi à it. buonamano, de même sens (v. Battaglia, qui cite Goldoni, D’Azeglio et Bacchelli). Le type est
très bien attesté dans les dialectes du Tessin, avec les sens de “souhaits et étrennes de fin d’année ; fin d’année ; don, pourboire” ; son aire de distribution initiale se situerait dans la partie centre-orientale
de l’Italie septentrionale et de l’arc alpin (v. VSI 2, 671b). Pour une discussion
étymologique approfondie, v. Rosanna Zeli dans VSI 2, 671-3, qui propose comme étymon
un composé de mane “matin”.
Bibliographie. HumbGen 1852 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch 1867 ; LittréSuppl 1877 ;
Plud’hun 1890, p. 12a (qui suggérait déjà qu’il puisse s’agir d’un italianisme) ;
Lar 1899 ; OdinBlonay 1910, p. 74a (dans la métalangue définitionnelle) ; Pier ; Lar 1928 ;
GPSR 2, 492a s.v. bonne2 3 ; FEW 6, I, 294a, manus I 1 et note 55 ; IttCons 1970 (> CuenVaud 1991) ; Battaglia ; VSI 2, 666-673 s.v. bonamán ; TLF 4, 679b s.v. bonne-main ; Alpha 1982 ; GR 1985 ; RézeauBibl 1986 s.v. étrenne ; GuichSavoy 1986 s.v. main ; GagnySavoie 1993 (s.v. main) ; « usuel en français du Jura » RobezMorez 1995 ; GR 2001.
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